Terminer mon voyage en Turquie par la Cappadoce, c'est en quelque sorte terminer en beauté. Comme tout un chacun, j'avais vu des photos de paysages lunaires, de cheminées de fées, de villages troglodytiques, autant d'images étonnantes qui frappent l'imaginaire. Aujourd'hui, j'ai l'occasion de les voir en vrai...

La carte de la Turquie avec Göreme en point de mire.
Nous roulons sur le plateau de Cappadoce depuis un bon moment quand soudain, au détour d'un virage, apparaît le village de Göreme. Les passagers du minibus poussent un "Oh !" de surprise et d'émerveillement. Le paysage est tout simplement incroyable.

Les falaises troglodytiques de Göreme.
La Cappadoce est un plateau dont le sol, très tendre, est constitué d'un tuf d'origine volcanique formé par l'agglomération de cendres et de boues rejetées par d'anciens volcans. Année après année, siècle après siècle, l'érosion a creusé des vallées et des canyons, raviné des falaises et sculpté des monolithes, donnant au paysage un aspect fantastique. L'homme a fait le reste en creusant ici et là des habitations troglodytiques.

Une des nombreuses cavités creusées dans la falaise.
Construites dès le IVe siècle, ces habitations troglodytiques ont servi de refuge aux chrétiens, notamment lors des incursions arabes des VIIe et VIIIe siècles. L'idée était de s'y cacher pour ne pas être repéré et pouvoir, en cas d'attaque, se défendre plus facilement.

Une habitation troglodytique aujourd'hui abandonnée.
La plupart de ces habitations troglodytiques ont été délaissées au fil des siècles au profit de maisons plus confortables. Celles-ci se sont multipliées et le village de Göreme s'est développé au milieu de ce paysage pour le moins insolite. Ainsi, il n'est pas rare de voir un de ces cônes de tuf, devenus inutiles, trôner au fond du jardin...

Le village de Göreme.
Certains s'en sont très bien accommodés en y aménageant des chambres d'hôtel. Cela plaît énormément aux touristes, toujours avides d'expériences originales.

Une habitation troglodytique restaurée.
Le minibus nous dépose sur la place centrale du village. Je reprends mon sac à dos et me mets en quête d'une pension pas trop chère. J'en trouve une à deux pas du centre qui, avec son joli patio et sa verdure, respire le calme.

La Tabiat Pension.
On me propose un lit dans un des dortoirs creusés dans la roche. Le confort est très basique mais comme aucun autre client ne se présente, je dispose de trois lits pour moi tout seul !

La chambre troglodytique.
Le lendemain matin, alors que le soleil pointe tout juste à l'horizon, je suis réveillé par un souffle bruyant qui semble provenir de la cour. Je sors et en levant les yeux, j'aperçois une montgolfière dans le bleu du ciel.

Le vol d'une montgolfière au-dessus de Göreme.
Je me retourne et je vois dix, vingt, trente autres montgolfières s'élevant dans les airs les unes après les autres. C'est féérique...

Le ballet des montgolfières.
Elles semblent se jouer des obstacles, passant au ras des monolithes de tuf et des habitations, remettant les gaz au dernier moment. Ah ! Quelle émotion cela doit être de survoler ainsi un tel paysage...

Attention aux obstacles...
Après environ une heure de vol, poussées par un vent très faible, elles se posent sur le plateau juste derrière moi.

Atterrissage imminent.
A la sortie du village de Göreme se trouve une vallée, devenue maintenant un parc national, qui regroupe une cinquantaine de sanctuaires taillés dans la roche dont une trentaine sont ouverts au public. C'est l'oeuvre de moines chrétiens qui, dès le IVe siècle, vinrent s'établir ici en petites communautés.

Le parc national de Göreme.
J'ai choisi de vous montrer quatre églises (ou chapelles) qui témoignent de l'évolution à la fois de l'architecture et des peintures murales.
La première affiche une grande simplicité : une simple pièce grossièrement taillée dans la roche. Ici et là, quelques figures géométriques et des croix, décor très représentatif de la période iconoclaste byzantine (VIIIe-IXe siècles), période de crise politique et religieuse pendant laquelle toute représentation du divin était proscrite.

Une petite chapelle rupestre (IXe siècle).
Dans la chapelle Sainte-Barbe (Azize Barbara Şapeli), on trouve également des figures géométriques et des croix mais aussi, élément nouveau, quelques fresques. C'est la fin de la période iconoclaste et le retour des icônes.

La chapelle Sainte-Barbe (XIe siècle).
L'Eglise à la Pomme (Elmalı Kilise) ci-dessous témoigne de l'évolution de la peinture comme un art. On a peint des saints, des évêques, des martyrs et des anges avec une grande précision. Les costumes sont détaillés et les visages, sur fond clair, sont mis en valeur.

L'Eglise à la Pomme (fin XIe-début XIIe siècle).
Ici, les scènes bibliques sont représentées de façon très sobre, ce qui facilite leur identification.

La fresque de l'arrestation du Christ (début XIIe siècle).
Dans l'Eglise Sombre (Karanlık Kilise), la peinture religieuse atteint son apogée, avec une richesse inégalée tant dans les couleurs que dans le dessin. Les fresques couvrent entièrement les murs, les arcades et les voûtes. Il y a une telle profusion que l'on ne sait plus où donner de la tête...

L'Eglise Sombre (fin XIe-début XIIe siècle).
L'Eglise Sombre (Karanlık Kilise) doit son nom à l'obscurité qui y règne, la seule source de lumière naturelle provenant d'un petit oculus donnant sur le narthex. C'est d'ailleurs pour cette raison que les couleurs ont gardé leur éclat. Une fresque retient mon attention, celle de la Cène. L'ébauche de perspective, avec la table et les apôtres au premier plan et les bâtisses à l'arrière-plan, est assez étonnante.

La fresque de la Cène (XIIe siècle).
La situation géographique de Göreme, au milieu des monolithes de tuf, et son patrimoine historique en font un lieu unique. On pousse des "Oh !" et "Ah !" d'étonnement et d'émerveillement à chaque nouvelle découverte. La présence d'un grand nombre de touristes n'enlève rien à la magie du lieu. C'est une étape incontournable pour qui visite la Cappadoce.