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29 mars 2009 7 29 /03 /mars /2009 21:50


Quand j'arrive au terminal de bus d'Erzurum, le bus en partance pour Kars est déjà là. On m'invite à mettre mon sac à dos dans la soute à bagages. Le temps d'aller acheter mon billet et de passer aux toilettes, plus de bus, il est déjà parti ! Je n'imaginais pas perdre mes affaires de façon aussi stupide. Deux messieurs assis sur un banc, hilares, m'expliquent que le chauffeur est simplement parti chercher des voyageurs en ville et qu'il va revenir sous peu. Je pousse un soupir de soulagement. J'apprendrai plus tard qu'il s'agit de la compagnie de bus "Kafka", tout s'explique...


La carte de la Turquie avec Kars en point de mire.


La région que nous traversons depuis Erzurum fait partie de l'ancienne Arménie qui s'étendait sur un territoire immense, comme le montre la carte. Elle va être l'objet d'un conflit territorial tout au long de son histoire. Au Xe siècle, Kars devient la capitale d'un des royaumes d'une Arménie déjà réduite géographiquement et morcelée. A partir du XIe siècle, le pays, amputé d'une grande partie de son territoire historique, sera convoité par l'Empire ottoman (à l'Ouest), l'Empire perse (au Sud) et plus tard, au XIXe siècle, par l'Empire russe (au Nord). Il sera finalement intégré à l'Union soviétique en 1920, avant de devenir indépendant le 21 septembre 1991.


La carte de l'ancienne Arménie en 80 avant Jésus Christ avec les frontières des pays actuels.


Après 4 heures de route, j'arrive enfin à la Maison des Enseignants. Malheureusement pour moi, toutes les réservations sont annulées. Le Président turc est en visite officielle à Kars et l'hôtel est réquisitionné. Il me faut trouver un autre hôtel. C'est bien la première fois qu'un Président de la République dort dans ma chambre...

Kars a gardé les traces de l'époque russe. La ville est construite selon un plan rigoureusement géométrique, les larges avenues sont tracées au cordeau et les bâtiments en béton sont carrément austères. Ajoutez à cela des rues poussiéreuses, des trottoirs défoncés, des échoppes misérables et vous aurez une petite idée de Kars... Fort heureusement, le vieux quartier, près de la rivière, recèle quelques richesses historiques comme la citadelle (Kars Kalesi), perchée en haut d'une colline ainsi qu'un vieux pont de pierre (Taş Köprü).


La citadelle (XIe-XVIe siècles) et le pont de pierre (1725).


Ce dernier fut détruit par un tremblement de terre au XVe siècle et reconstruit au XVIIIe siècle. Quant à la citadelle, témoin de toutes les vicissitudes de l'histoire de Kars, elle a été reconstruite plusieurs fois. Les remparts que l'on voit aujourd'hui datent de 1579.


La porte d'accès à la citadelle.


Du haut de la citadelle, on jouit d'une vue sur le plateau de Kars et le paysage de steppe environnant.


L'enceinte de la citadelle surplombant la ville.


En contrebas, à la limite de la partie moderne de la ville, une ancienne église se distingue par son architecture, l'église des Apôtres.


La ville de Kars avec l'église des Apôtres (932-937) au premier plan.


Malgré les apparences et l'absence de minaret, l'église des Apôtres est aujourd'hui une mosquée (Kumbet Camii) et le muezzin, micro en main, y chante divinement bien. C'est ici que j'entendrai le plus bel appel à la prière de tout mon séjour en Turquie, frissons garantis...


L'église des Apôtres et ses porches d'entrée (ajout russe du XIXe siècle).


Elle est ainsi appelée en raison des bas-reliefs sculptés au niveau du dôme qui représentent les douze disciples de Jésus.


Deux des bas-reliefs représentant les apôtres.


A l'intérieur, en dehors des quelques aménagements liés au culte musulman (minbar et mihrab), on reconnaît l'architecture traditionnelle des églises arméniennes : une croix inscrite dans un carré et surmontée d'un dôme.


L'intérieur de l'église des Apôtres.


Aussi étrange que cela puisse paraître, le musée est situé à quatre kilomètres du centre-ville, de quoi décourager plus d'un touriste. De fait, je suis l'unique visiteur. On y trouve pourtant de belles collections d'objets d'époque seldjoukide et ottomane. Je m'arrête devant une vitrine hautement colorée. On y trouve tout l'équipement nécessaire au cavalier des steppes, comme pour nous rappeler que les Turcs de la région ne sont autres que les descendants des cavaliers Mongols qui déferlèrent sur la région, entre le XIIe et le XIVe siècle, à la conquête d'un nouveau territoire. Parmi eux, deux figures célèbres : Gengis Khan et Tamerlan.


Tapis, selle, sacoches, étriers...


Par souci d'économie, le gardien allume manuellement les lumières des différentes salles (et des vitrines) où je passe et les éteint dès que j'en sors. Quelle misère...


Un coussin et des tapis aux motifs typiques de la région et un plateau avec un gobelet en or et argent.


Le soir, alors que je rentre à l'hôtel, j'ai la surprise de tomber sur une demi-douzaine de policiers. Simple vérification de papiers. Voyant ma nationalité, le chef me rend ma carte d'identité avec un grand sourire en me souhaitant en français un "bon voyage". Que cherchent-ils, je n'en ai aucune idée. Il faut dire que la frontière avec l'Arménie, toute proche (50 km), est officiellement fermée. Redoutent-ils quelques infiltrations ?

Rendez-vous est pris le lendemain matin avec un guide anglophone qui doit nous emmener, moi et d'autres européens en visite dans la région, sur le site d'Ani, justement à la frontière arménienne...

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commentaires

N
Lors de mes deux passages à Kars, je n'ai pu voir l'intérieur de l'église, elle semble être ouverte uniquement aux heures de prière. Le musée, bien qu'un peu excentré, mais finalement pas si inaccessible que cela à pied, mérite tout de même le détour.
Répondre
H
<br /> <br /> Tout à fait d'accord. Le plus simple est de se faire déposer devant l'entrée du musée au retour d'Ani puis de rejoindre le centre-ville à pied.<br /> <br /> <br /> <br />